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S’adapter – Clara Dupont-Monod

S’adapter – Clara Dupont-Monod

Quatrième de couverture :

C’est l’histoire d’un enfant différent, toujours allongé, aux yeux noirs qui flottent, un enfant inadapté qui trace une frontière invisible entre sa famille et les autres. C’est l’histoire de sa place dans la maison cévenole où il naît, au milieu de la nature puissante ; de sa place dans la fratrie et dans les enfances bouleversées. Celle de l’aîné, qui, dans sa relation fusionnelle avec l’enfant, s’abandonne et se perd. Celle de la cadette, dans la colère et le dégoût de celui qui a détruit l’équilibre. Celle du petit dernier qui a la charge de réparer, tout en vivant escorté d’un frère fantôme.

Comme dans un conte, les pierres de la cour témoignent. Comme dans les contes, la force vient des enfants, de l’aîné qui aime follement, de la cadette révoltée. Du dernier qui saura réconcilier les histoires.

La naissance d’un enfant handicapé racontée par sa fratrie. Magnifique et lumineux.

Mon avis :

Dès les premières pages, j’ai été touchée par ce récit poignant, raconté à travers le regard des enfants de la famille. L’aîné, la cadette et le dernier. La justesse des mots qui va droit au cœur même si cette situation m’est totalement inconnue. Finalement, pas besoin de vivre ce même quotidien pour imaginer et comprendre la douleur ressentie à l’annonce du handicap d’un enfant. Et le bouleversement que cela entraîne inévitablement au sein de la famille au complet.

J’ai été suspendue à cette souffrance à fleur de peau, à cette famille qui a appris à vivre avec l’enfant en composant avec la réaction propre à chacun. Chacun sa place, chacun sa manière d’accepter l’inacceptable. L’amour qui unit cette famille, à travers l’une des pires épreuves de la vie, m’a transpercé le cœur. On s’imagine, tour à tour, le grand frère ou la sœur d’un enfant à qui l’on prédit seulement quelques années à vivre, la maman d’un enfant condamné d’avance. Mon cœur s’est serré tout au long des pages, à la fois remplies de douceur et de douleur mêlées.

Un récit tout en pudeur, qui met l’accent sur le ressenti des enfants. Tout d’abord l’aîné qui, de part sa position, endossera le rôle d’éternel protecteur, complice. Un lien fusionnel a travers le temps, peu importe ce qu’il en coûtera, une volonté à vouloir laisser une trace à jamais. La cadette qui elle, n’aura que pour seule arme, sa colère. Son sentiment de profonde injustice face à cet événement qui a bouleversé l’équilibre de sa famille. Sa rage face à cet enfant qui occupe l’esprit de ses parents en continu, celui qui lui a volé sa propre enfance et fait perdre son innocence bien trop tôt. Son rejet face à cette vie qui s’obstine à les faire souffrir.

Enfin, on ressent la culpabilité du petit dernier, qui a dû se construire avec l’image de celui qui remplace l’Enfant disparu. Qui ne cesse de s’interroger sur le fait qu’il vive alors que son frère n’est plus là. Pourquoi ? Il va de cesse endosser le rôle de celui qui répare, adoucit un quotidien qui a pesé sur les toutes les épaules.

L’enfant, sans parole, sans aucune défense, sans regard, absent mais omniprésent tant il occupe l’esprit de la famille. Un quotidien où la Nature offre toute sa puissance et son pouvoir de vérité, sa sérénité. Celle qui aide à se relever, à continuer le chemin. À trouver l’apaisement quand la colère gronde et menace de tout emporter.

Le rôle de l’entourage, primordial. Qui aide moralement à affronter tous les tourments, à conserver un semblant d’enfance et d’innocence face à la brutalité de la vie. Qui prend en considération chaque individu lorsque le quotidien nous envahit et la peine nous engloutit. Qui offre des moments simples loin de l’agitation et nous aide à grandir le plus normalement possible. Qui comble un vide lorsque tout s’écroule.

Et cette délicieuse odeur de gaufre à l’orange a adoucit mon après-midi face aux émotions ressenties à travers cette lecture, douce et puissante à la fois. On se sent bien petit face à ce que certaines familles affrontent. Une lecture qui m’a secouée et me donne toujours plus l’envie féroce de profiter de chaque petit plaisir que la vie nous offre.

L’avez-vous lu ? Qu’en avez-vous pensé ?

Je vous souhaite une belle et agréable fin de journée. Tout en douceur et pleine de bienveillance. D’acceptation et tolérance face aux différences qui nous entourent.

Mes extraits :

• « Quel drôle de monde où l’on apparente l’amour à un but, et quel dommage de ne pas comprendre qu’au contraire, l’amour c’est se noyer dans les yeux de l’autre, même si ces yeux sont aveugles »

• « A trop frémir au moindre bruit du monde, à craindre le pire, on n’équilibre personne »

• « Si un enfant va mal, il faut toujours avoir un œil sur les autres. Car les bien portants ne font pas de bruit, s’adaptent au contour cisaillants de la vie qui s’offre, épousent la forme des peines sans rien réclamer »

• « Dira-t-on un jour l’agilité que développent ceux que la vie malmène, leur talent à trouver chaque fois un nouvel équilibre, dira-t-on les funambules que sont les éprouvés ? »

« On peut aimer sans avoir peur qu’il arrive malheur à la personne qu’on aime, on peut donner sans avoir peur de perdre, il ne faut pas vivre les points serrés, dans l’attente du danger »

• « Il n’y a qu’une lettre qui sépare livre et libre. Si tu ne lis plus, c’est que tu es complètement enfermé »

« Avoir connu le pire éloigne la peur. On l’a traversé, donc on le connaît. On a les réflexes et le mode d’emploi. La peur vient de l’inconnu »

Ma note : 8/10

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