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Clarisse Sabard – A la lumière de nos jours

Clarisse Sabard – A la lumière de nos jours

Quatrième de couverture :

2013 : Après de longues années d’absence, Julia débarque dans sa famille paternelle, en plein cœur de la Touraine. Fraîchement renvoyée du célèbre concours de pâtisserie pour lequel elle travaillait, dévastée par le récent décès de sa mère, la jeune femme est complètement perdue. Mais les dernières volontés de sa mère sont claires : Julia doit renouer avec son père, retrouver ses proches et partir en quête de son héritage. Accueillie à bras ouverts par sa grand-mère Suzette, qui rêve de Léa voir reprendre la pâtisserie familiale, la jeune femme se retrouve rapidement plongée au cœur de l’histoire des trois générations de femmes qui l’ont précédée.

Des faubourgs parisiens des années 1920 en passant par les heures les plus sombres de l’Occupation, les secrets d’une famille, mais aussi de tout un village, éclatent l’un après l’autre. Et c’est peut-être à ce prix, une fois les blessures du passé guéries, que Julia pourra avancer dans la lumière.

Mon avis :

J’ai passé un vrai bon moment de lecture avec ce nouveau roman de Clarisse Sabard. De la première à la dernière page, j’ai apprécié et profondément aimé cette histoire. Comme un journal de bord ou journal intime qui n’a pas quitté mon chevet. Sensation agréable de découvrir, en toute confidence, les pans de vie d’Eugenie, Suzette et Julia. Comme si c’était à moi que ces trois femmes se confiaient. Je ressors émue, bouleversée par ce livre car criant de vérité, humanité, sensibilité. Une justesse d’écriture qui fait que j’ai avalé ces 600 pages, avec cette envie irrésistible de toujours vouloir en savoir plus. L’histoire, dure et éprouvante, de ces femmes devraient marquer votre cœur d’une empreinte indélébile.

L’histoire démarre avec Julia, la trentaine, qui vient de perdre, en l’espace de quelques semaines, son travail et sa mère. Elle subit un véritable choc qui la laisse désœuvrée et complètement perdue. Sa mère lui a laissé une lettre en demandant à Julia de respecter ses dernières volontés : se réconcilier avec son père et lui pardonner ses erreurs du passé. Pour cela, elle doit quitter Paris et retourner dans sa région natale : la Touraine. Une contrée chère à mon cœur puisque j’y ai construit certains de mes meilleurs souvenirs d’enfance.

Alors qu’elle doute profondément d’elle et de ses envies, qu’elle a perdu la foi en ce qui l’anime depuis toujours, ses retrouvailles avec son père lui permettront-elle de retrouver l’énergie et la force de se relever ? Retrouvera-t-elle le goût de la pâtisserie et l’envie de faire pétiller les papilles en offrant ce qu’elle sait faire de mieux ? En réveillant les fantômes du passé, parviendront-ils à s’épauler et retrouver une relation épanouie ? S’offriront-ils le droit d’être heureux ?

Grâce aux confidences de son père qui accepte de rouvrir les portes du passé et de partager avec Julia des pans entiers de la vie de ses aïeules, elle va découvrir des femmes hors du commun, leurs blessures secrètes, des secrets enfouis et protégés. On va se plonger au temps de la guerre, de l’Occupation, de la Résistance, des pertes humaines aussi terribles que cruelles. Une époque qui m’a toujours interpellée, intéressée car pas si éloignée de nos temps et que nos grands-parents ont vécu sans forcément remuer et partager ce douloureux passé.

A travers de magnifiques histoires d’amour qui ont fait chavirer mon cœur, j’ai découvert le courage et le choix de devenir Résistant au péril de sa vie. Le besoin de se concentrer sur le présent pour ne pas laisser la haine alourdir son cœur. Toujours choisir la lumière de la vie malgré les drames, comme le rappelle si justement le titre du roman. Les secrets et non-dits qui peuvent faire tant de mal malgré l’unique intention de vouloir protéger. On ressent la fierté de Julia d’appartenir à la lignée de ces femmes fortes et le besoin de découvrir ce qu’elles ont traversé.

Lorsque ces secrets ne sont jamais révélés, il demeure comme une part d’ombre pour toujours. A ma grand-mère qui n’a jamais abordé son passé mais dont je devine ses souffrances à travers ses silences. Sa force pour continuer à avancer et nous offrir tous ces moments de bonheur gravés à jamais dans mon cœur. Alors oui, je suis de celles qui croient dur comme fer qu’écrire permet de transmettre et de ne surtout pas oublier la richesse de nos vies. J’aime me souvenir de l’odeur de tarte aux pommes qu’elle me préparait systématiquement, à chacune de mes visites, dans le seul but de me faire plaisir. Je suis convaincue qu’elle a réussi à nous transmettre sa générosité et sa force de la nature.

Je ne peux que vous conseiller cette lecture qui m’a profondément bouleversée. Ces héroïnes ne sont pas prêtes à quitter mon esprit de sitôt.

Mes extraits :

• « Il n’y a qu’en prenant du recul que tu pourras avancer. Quand on a l’impression de se battre contre des vents contraires, la réponse à nos maux se trouve la plupart du temps au cœur de nos racines »

• « Il existe différents degrés de douleur, quantité de raisons. Au final, c’est la même chose. Tu as le droit d’avoir mal et de chercher comment rebâtir ton monde »

• « C’est courant de se reprocher la mort d’un proche. Mais gaspiller notre temps en remords, ça ne ramène pas les gens à la vie »

• « Je me souviens avec une nette précision des deux gamins que vous étiez. Je me souviens des tartes aux pommes que vous me réclamiez sans cesse pour le goûter, du plaisir que vous preniez à pétrir la pâte avec moi. Vous disiez tout le temps que, lorsque vous seriez grands, vous ouvririez votre propre pâtisserie pour donner du bonheur aux gens »

• « On ne pèse jamais bien lourd face à ce que le destin décide pour nous. Mais ce n’est pas une raison suffisante pour baisser les bras ; vous ne feriez que récolter une amertume qui vous collera aux basques durant toute votre existence »

• « Je t’aime par dessus tout, je me fiche du passé. Seul l’avenir compte et doit monopoliser nos espérances »

• « Avec émotion, j’avais découvert l’écriture ronde d’Eugenie, demandant à ses parents la permission d’épouser Marcel. Leur portrait avait disparu, sans doute rangé ailleurs ou égaré au fil du temps, mais cela n’avait pas entaché mon plaisir de tenir entre mes mains la feuille d épauler jaunie, légèrement déchirée dans un coin, et d’autres, dans lesquelles elle racontait son quotidien. Ces lettres étaient de précieux souvenirs dilués dans l’encre »

• « Une fois qu’on s’est retranché en soi-même, on ne sait plus comment s’en sortir. J’imagine que c’est confortable, quand on est fait pour la solitude, mais moi, ça me broie de l’intérieur »

• « Vivre, c’est affronter la peur, Suzette. Alors debout et la tête haute ! Elle ne se laissait démonter par rien ni personne »

• « Nous sommes encore jeunes. Nous sommes à la lumière de nos jours et c’est pendant que sa lueur brille que nous devons avancer vers elle »

• « La plaie est restée ouverte un moment mais je ne pouvais pas laisser ma tristesse devenir toxique. Ça rouille trop le cœur. Alors j’ai décidé d’aimer à nouveau le jaune, l’été, les chansons de Françoise Hardy et de sourire »

• « Tu m’as appris que chacun est livre d’écrire son histoire comme il l’entend. Je crois que c’est la magie de l’existence »

Ma note : 10/10

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